Mon retour a été, il faut le dire, plus difficile que je ne le pensais. Tout d’abord, rentrer sans Rémy alors que nous avions partagé 1 an et demi 24h sur 24 fut déstabilisant.
Je passais d’une liberté et spontanéité totale à une organisation serrée, où l’été devait être planifié pour répondre aux attentes de chacun (y compris les miennes) et aux obligations de la société.
La première semaine, j’avais l’appétit coupé et le moral bien atteint. « Et maintenant quoi ? »
Heureusement je retrouvais les proches mais je n’avais pas l’état d’esprit pour en profiter totalement.
Bientôt Rémy me rejoignait et lui aussi perdit l’appétit. Le retour nous prenait comme un tsunami alors que nous voguions sur un lac tranquille et paisible… nager ou couler, voilà ce qu’il nous restait.
Voici maintenant 2 mois et demi que je suis rentrée et un peu moins pour Remy. Après deux contre coup difficile, cela va mieux grâce au soutien de tous nos proches. Nous recherchons du travail et un chez nous pour planter notre arbre, car c’est avec l’arbre que l’on construit la pirogue !
Ceux qui rentrent de voyage comme celui-ci disent que l’on met environ la moitié du temps parti pour se « ré-adapter ». Nous verrons bien.
En tout cas, quoiqu’il en soit, jamais nous ne regretterons cette expérience incroyable, enrichissante, apaisante, et difficilement exprimable. Ce que nous avons gagné, dans nos esprits et pour notre couple n’a pas de prix.
Si vous vous tâtez à partir, à faire l’expérience du « détachement », de la liberté d’espace et de temps, nous vous disons : allez-y ! Mais surtout ne planifier pas trop votre voyage, laissez la place à l’imprévu et réduisez au maximum les contraintes d’organisation.
Nous vous laissons à présent à vos rêves et vos vies, à vos voyages géographiques comme spirituels sur ce petit extrait de mon carnet, écrit en Nouvelle Zélande lors d’un de nos meilleurs moments du voyage.
« Le 08 juin, Gibbson Valley, Nouvelle Zélande,
Il a fait super froid cette nuit. J’ai même rêvé que j’avais le buste qui gelait et quand je me suis réveillée dans la nuit, j’avais le buste en dehors de la couette, gelé en effet ! Cette fois ci nous avions mis nos affaires dans le sac du duvet, dans le lit. Au réveil, tout était glacé dans le van : les vitres, le toit, la lente de l’appareil photo malgré qu’il était dans sa pochette, dans la boîte à gant. La batterie de l’appareil était à 0 à cause du froid. […]
Mais malgré cela, une fois habillés et dehors, on était bien avec notre café. Heureux. On a repris la route en faisant un petit coucou en partant au gars du van. Un coucou qui voulait dire « On a eu froid, mais on est content de cette vie, de cette beauté de la nature… bonne route l’ami, vive la liberté, vive la route ! ». On a pris la direction du Mont Cook…incroyable, de toute beauté ! Ces montagnes gigantesques enneigées, ce lac et ces rapaces volant au-dessus de tout, rois de la wild, de la liberté…
Chaque parcelle de cette route était magnifique, majestueuse, somptueuse… et même en y étant, on avait envie de s’y plonger encore plus, dans ce cadeau de la nature, cette richesse du moment et de chacun ayant mené sa destinée jusqu’ici. […]
Voilà, c’est chouette, beau et froid mais on profite à fond. On est dans l’instant, dans l’improvisation des journées et c’est ce qui fait que l’on se sent bien et en lâcher prise. C’est dans l’instant qu’est le bonheur mais dans l’instant improvisé, celui qui arrive sans prévenir, sans planifier. C’est dans la découverte de chaque paysage, l’observation de chaque rapace, le doux roucoulement du moteur que l’on trouve la sérénité. Et cela doit être possible dans le quotidien à condition de laisser place à l’instant et de le contempler.
Dur défi pour notre société actuelle celui de faire confiance au destin et de se laisser guider par sa petite voix intérieure, son étoile, sans chercher à construire le bonheur. Celui-ci ne se crée pas à la sueur de longues années de labeur, il est, simplement il faut savoir le voir. Et la difficulté est qu’il fait partie d’un tout, loin de notre idéale vision de la perfection. Mère nature nous l’apprend car elle est perfection et elle est instant… et pourtant ses animaux se tuent les uns et les autres, se donnent la vie et font preuve de compassion comme ils savent être sadiques et égoïstes. Chacun lutte pour sa survie et l’ensemble des réussites et des échecs fait que l’ensemble existe.
Si demain, aucun animal ni plante ne mourrait, ce serait la fin de l’existence. Et de la même manière que le jour fait place à la nuit, et l’hiver au printemps, nos larmes font place à nos rires et nos bonheurs à nos malheurs…
Et j’écris cela dans un confort sommaire, les pieds froids sous 4 duvets et pourtant… je suis heureuse en cet instant. Dans ces périodes-là, j’ai la confirmation que le bonheur n’est pas dans le matériel, ni dans l’abondance. Il est dans l’indispensable vrai, à boire, à manger, à aimer, à contempler, à partager.
Cette bouffée de nature et de liberté nous a permis de nous retrouver et nous sommes bien de nouveau.
Le retour me stress un peu car les deux mois d’été ne laisse guère de place à l’improvisation et à l’instant. Mon challenge sera de les vivre quand même et de ne pas me laisser avaler par le train des obligations de ma propre conscience et de celles des autres. »
Merci à vous tous qui avez suivi notre blog, à vos pensées lointaines et bienveillantes et à la manière dont vous nous avez compris à notre retour, et retrouvé comme si nous nous étions quitté la veille.
Et enfin, bonne route aux voyageurs, qui viendraient picorer des informations comme nous l’avons fait sur d’autres blogs. Que votre route soit aussi belle que fut la nôtre, et que les difficultés comme les bonheurs vous amène à vous trouver.